Un des piliers de l’industrie automobile française, PSA Peugeot Citroën, est devenu le symbole d’une France qui perd ses usines et envoie au chômage ses derniers cols bleus. Retour sur une affaire d’Etat et ses zones d’ombres.
PSA n’est toujours pas sortie de sa zone de turbulences. Après l’annonce du Gouvernement d’organiser trois réunions tripartites avec les syndicats et les actionnaires, la situation est loin d’être résolue. Plus de 8000 postes sur le site d’Aulnay sont menacés.
Philippe Varin, le PDG de la marque au lion a dicté ses conditions lundi 8 octobre par rapport à ces réunions. Le projet d’alliance avec l’américain General Motor (GM) ne sera pas abordé. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, estime pourtant qu’il conviendrait « d’évoquer la pertinence de l’alliance avec GM ».
L’Etat démissionnaire ?
Monsieur Montebourg est lui même issu de l’aile gauche de son parti. On peut s’interroger sur la fébrilité de ses déclarations sur le sujet très sensible voire tabou qu’est celle de l’influence de la multinationale américaine sur le groupe PSA.
En effet, depuis que les négociations avec GM se sont engagées, PSA a été sommé de sacrifier son deuxième marché après la France, l’Iran. La République Islamique représentait il y a encore 1 an environ 25% du volume de PSA avec 455 000 véhicules en 2011. « Un lobby financier américain, United Against Nuclear Iran (« Unis contre un Iran nucléarisé »), nous a demandé de cesser nos activités en Iran« , a aussi expliqué le porte-parole de PSA.
La CGT avait dénoncé cette stratégie. Le groupe a publié ses chiffres du premier semestre 2012, il y a une baisse de 240 000 véhicules par rapport au premier semestre 2011. Si l’on déduit les 200 000 véhicules supposément vendus en Iran, la perte réelle est de seulement 40 000 unités. Une baisse de 1%. « On est loin des 13 % annoncés par la compagnie », s’insurgeait Jean-Pierre Mercier, le délégué CGT du site.
« Une des conditions de l’accord entre GM et PSA était bien la rupture des activités avec l’Iran », affirme le spécialiste de l’économie iranienne, Fereydoun Khavand. Washington et Bruxelles s’entendent de concert sur le cas Iranien. Les sanctions internationales, d’une efficacité discutable impact directement un des piliers historiques de l’automobile française. La Maison-Blanche est propriétaire de 60% du capital de GM. La France suit la politique internationale américaine au détriment de son industrie durement frappée par la crise.
Un modèle industriel protecteur décrié
La famille Peugeot, actionnaire majoritaire, fait partie de ceux qui ont construit et industrialisé la France. Peugeot représente ce qu’on pourrait appeler un capitalisme national vertueux : richesses, emplois et réponses aux demandes du marché hexagonal. Pourtant, les actionnaires, leurs dividendes et la famille Peugeot sont unilatéralement stigmatisés. Selon certains experts, la faillite de PSA s’explique par son manque de délocalisation puisque 44% de sa production est assurée en France. Son concurrent direct, Renault ne produit que 23% de ses véhicules dans l’hexagone.
Face au ralentissement du marché européen, l’implantation depuis 1979 de Peugeot en Iran était un atout mondial et primordial. Les voitures iraniennes sont produites en France pour être acheminée en pièces détachées. Sur le même sujet, PSA pourrait aisément se développer au Vénézuela qui ne possède pas de réelle industrie automobile. Désormais riche en avoirs grâce au pétrole, c’est un nouveau marché de 28 millions d’habitants qui est à la portée du constructeur tricolore. Toutefois, le contexte de défiance politique envers ce pays rend impossible ce genre d’initiative lucrative.
Le carton rouge vif
Le fait plus surprenant est l’attitude des syndicats et du gouvernement. La CGT n’a plus évoqué se sujet épineux de GM et l’Iran. Quant à Arnaud Montebourg, ses déclarations spontanées sur le sort des ouvriers d’Aulnay lui ont déjà valu un « carton rouge » au Salon de l’Automobile ainsi que de fortes réprobations au sein même du gouvernement. Quoiqu’il en soit, le marché iranien s’est comme « volatilisé » médiatiquement et politiquement. Il est difficile d’expliquer à l’opinion publique que la France a besoin des exports vers la République des mollahs tandis que le Quai d’Orsay multiplie les déclarations martiales envers ce pays.
Aujourd’hui, l’Etat recule sur ses promesses et laisse la porte ouverte à un plan social lourd de conséquences. Un nouveau baiser de judas pour l’industrie et l’économie hexagonale.
sources : Le Point, Le Figaro, Le Monde, site de la CGT, ER
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