Ce weekend à Orlando se tiendra le NBA All Star Game. Les meilleurs joueurs des deux conférences s’affronteront dans un match de gala dont le public américain raffole. Spectacle et sourires seront au rendez-vous pour cet événement conçu pour soigner l’image d’un championnat qui en a bien besoin. Roads revient sur l’histoire tourmentée de cette ligue et fait un point sur la situation actuelle.
En 1984 quand David Stern arrive à la tête de la NBA, le championnat n’est pas vraiment au sommet de sa popularité. Derrière le duo Magic Johnson / Larry Bird, il n’y a presque rien. Les anciennes stars des années 70 telles que Julius Erving ou encore Kareem Abdul Jabbar arrivent en fin de carrière et la relève ne semble pas pouvoir être assurée. A cela s’ajoutent des affaires de drogues qui ne font que ternir un peu plus l’image du championnat. Pourtant, David Stern a bénéficié l’année de son arrivée d’un incroyable coup du destin.
Le début d’une nouvelle ère
Si il y a une draft qui restera dans les mémoires, c’est bien celle-ci. Michael Jordan, Hakeem Olajuwon, Charles Barkley ou encore John Stockton ont tous été draftés cette année là. Grâce à eux, la NBA entra dans une nouvelle ère et s’exporta partout à travers le monde. Des millions de fans érigèrent Jordan au rang d’icone mondiale et firent de Nike, via son intermédiaire, le leader incontesté du marchandising sportif. L’avènement de la Dream Team aux Jeux Olympiques de Barcelone en 1992 ne fit que confirmer un peu plus l’hégémonie du basket américain sur le reste du monde. La NBA était donc devenue une marque internationale générant des millions de dollars de recette.
Une gestion tyrannique
Ce que beaucoup oublient c’est qu’à la différence des championnats sportifs européens, la NBA est gérée comme une véritable entreprise conçue pour générer des profits et où l’aspect commercial prime sur la compétition. En tant que grand patron, David Stern dirige la ligue américaine d’une main de fer. Tel un monarque, c’est lui qui approuve toutes les décisions concernant les clubs ou les joueurs, chaque équipe est une franchise et chaque joueur un employé. Tout écart de conduite est bien sûr lourdement sanctionné par Stern en personne qui n’hésite pas à décider lui même du montant des amendes qu’il inflige à « ses employés rebelles. »
Le déclin
La retraite de Michael Jordan en 1998 plongea la NBA dans une certaine torpeur. Une nouvelle génération de jeunes joueurs talentueux mais à la réputation sulfureuse provoqua le désintérêt des classes moyennes américaines pour le championnat voyant en ces jeunes afro-américains issus des ghettos la décadence de l’Amérique. Bien que pétris de talent, Allen Iverson ou encore Steve Francis incarnaient ce que cette Amérique bien pensante combattait et ce que David Stern détestait : la réussite « black » porteuse des valeurs de la rue. Le hip hop, les tatouages, les signes extérieurs de richesse, la délinquance voilà ce que la NBA ne voulait pas présenter à « l’average Joe » qui ne n’arrivait plus s’identifier à ces idoles. Ce décalage entre les joueurs et le public ne pouvait plus durer. Stern décida donc d’interdire aux joueurs âgés de moins de 19 ans de se présenter à la draft. Cette règle à pour conséquence de forcer tout les joueurs à aller à l’université un an au minimum avant de pouvoir être éligible pour la loterie de fin d’année. Hors, pour être admissible à la fac, les joueurs doivent obtenir des notes suffisantes au lycée. De ce fait, cette règle entraine une épuration en aval de tout les joueurs qui n’auraient pas réussi à se conformer au système scolaire américain ou qui viendraient d’écoles situées dans des zone très défavorisés. Grace à se système inégalitaire, les joueurs NBA ont aujourd’hui retrouvé une image de « gendres idéals » qui plait tant à l’Amérique blanche.
Un univers aseptisé
Aujourd’hui il ne reste presque plus aucun mauvais garçon au sein de la ligue. Cependant, cette image trop lisse commence à ennuyer une grande partie des fans NBA à travers le monde. Depuis que les joueurs n’ont plus le droit d’exprimer leurs émotions de manière trop ostentatoire sur le terrain (sous peine de fortes amendes), les matchs ont perdu de leur saveur et la compétition a laissée place à un spectacle de cirque parfaitement orchestré.
La façade menace de s’effondrer
A l’aube de cette saison, les tensions dues à la gestion Steve Jobesque de David Stern ont poussées les joueurs à se mettre en grève pour défendre leurs droits. En quête perpétuelle de profits, la NBA prévoyait notamment de baisser de 40% le salaire des joueurs et de modifier les règles de redistribution des bénéfices de chaque franchise prétextant que la majorité des équipes perdaient de l’argent . Les joueurs gagnent certes des millions de dollars par an mais sont-ils les véritables responsables de cette dérive ?
Contraints de jouer plus de 82 matchs par saison, ces jeunes athlètes sont en fait les vaches à lait de l’entreprise. Tout ce que la ligue leur demande c’est de jouer au basket. David Stern se charge du reste. Signer un contrat en NBA c’est un peu comme vendre son âme au diable. Les joueurs sont l’entière propriété des franchises qui peuvent par exemple décider de les empêcher de participer aux compétitions internationales avec leurs sélections nationales respectives. Imaginez telle situation en football ? Inimaginable.
Il paraît donc évident que pour supporter cela, les joueurs soient rémunérés à leur juste valeur, c’est à dire par rapport à l’argent qu’ils génèrent.
Pour être toujours plus spectaculaire la NBA a également mis au point un programme de lutte contre le dopage assez particulier, elle refuse de se soumettre aux standards internationaux qui prévoient plusieurs contrôles inopinés à tout moment de l’année. Les athlètes de la ligue ne sont effet testés qu’à quelques rares occasions en étant bien sûr prévenus à l’avance de la date du contrôle. L’Espagne n’est donc peut-être pas la seule concernée par les scandales de dopage…
Après plusieurs mois de négociations, le championnat a enfin pu reprendre. Ce weekend le All Star Game permettra à la NBA de soigner son image en réunissant toutes ses stars. L’entreprise continue de séduire, « the show must go on. » Jusqu’au jour où le rideau s’ouvrira sur les coulisses.
Par Raffael Cabin
Ridicule - Une succession de remarques de café du commerce pour un article a charge qui passe sous silence le formidable travail d’un homme qui a fait de cette ligue l’une des plus populaires et admirées du monde.