Les brasseurs allemands s’opposent au gaz de schiste

Arthur Beaufils 27/05/2013 0
En Allemagne, la bière est une institution. Le lobby des brasseurs a exprimé ses craintes quant à l’exploitation du gaz de schiste qui menace le décret sur la pureté de la bière et la qualité de cette boisson emblématique Outre-Rhin.

Alors que l’Allemagne cherche sa transition énergétique après son annonce de sortie du nucléaire, l’exploitation du gaz de schiste rencontre de nouveaux opposants : les brasseurs allemands. La fédération « Brauer-Bund », qui représente la majorité des professionnels de la boisson la plus populaire d’Allemagne, a envoyé une lettre à six ministres du gouvernement d’Angela Merkel. Cette missive fait état des craintes des brasseurs par rapport aux conséquences de la fracturation hydraulique. Un report du projet de loi de février a été demandé. Ce texte prévoyait notamment l’encadrement de cette méthode qui fait débat auprès des écologistes. Aujourd’hui, la fracturation est la seule méthode utilisée par extraire le gaz de schiste. Elle consiste à injecter sous très forte pression de l’eau, du sable et des produits chimiques dans les roches des sous-sols pour les briser et libérer le gaz.

La bière, une affaire de tradition

Malgré un certain principe de précaution qui envisageait d’interdire l’extraction hydraulique dans les zones riches en eau potable, les brasseurs sont inquiets. « Plus de la moitié des brasseurs utilisent des puits situés en dehors des zones qui seraient protégées par la loi », indique un porte-parole de la fédération Brauer-Bund.

Le premier pays producteur de bière en Europe et qui célèbre à Munich tous les ans la boisson au houblon élève en art le brassage de la bière. Depuis plus de cinq siècles, sa fabrication est légiférée par « le décret sur la pureté de la bière » qui oblige les brasseurs à utiliser uniquement du houblon, du malt, de la levure et de l’eau pure. Si la fracturation pollue les nappes phréatiques, c’est la réputation de toute la filière qui sera anéantie.

Houblon contre doublon

Les soutiens au gaz de schiste affirment que cette nouvelle ressource représente l’avenir énergétique de la planète et assurent que les forages peuvent éviter les nappes et donc les préserver. Aux Etats-Unis, la fracturation hydraulique a permis au pays de devenir le premier exportateur mondial de gaz devant l’historique producteur, la Russie. L’Europe, et notamment la France et la Pologne, serait dotée de gisements potentiels énormes. L’Allemagne bénéficierait de réserves de 2 300 milliards de mètres cube, soit trente fois la consommation du pays pour la seule année 2011. Cette manne et convoité par BASF ou Exxon Mobil et le gouvernement allemand y voit aussi le moyen de s’émanciper des importations russes.

Le gouvernement d’Angela Merkel prend tout de même ses précautions. Le mouvement pro-écologiste est très fort Outre-Rhin et la population s’oppose avec virulence à l’extraction du gaz de schiste. Politiquement, les principaux états-régions concernés, la Rhénanie-du-Nord-Westphalie et la Basse-Saxe ont refusé de donner les autorisations nécessaires. Au niveau fédéral, le projet de loi ne sera pas présenté avant les élections législatives de septembre, la preuve que les hommes politiques savent que ce sujet est un brûlant couperet électoral.

Pour en savoir plus sur le gaz de schiste, cliquez ici pour voir le documentaire Gasland.

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