BAC de Marseille: une affaire accablante pour la police

Raffael Enault 06/10/2012 0

Manuel Valls a décidé de suspendre les douze policiers mis en examen de la B.A.C nord de Marseille. Quelques semaines seulement après l’affaire Neyret, la police française n’en fini plus de plonger.

 BAC de Marseille: une affaire accablante pour la police

Présentés vendredi aux deux juges d’instruction marseillais chargés de l’affaire, douze policiers de la Brigade anti-criminalité (BAC) Nord de Marseille ont été mis en examen pour « vols en bande organisée, extorsions en bande organisée et infraction à la législation sur les stupéfiants », a-communiqué une source judiciaire proche du dossier.

« Sept d’entre eux ont été écroués dans plusieurs établissements pénitentiaires de la région, à l’exception des Baumettes« , a précisé le procureur de la République de Marseille, Jacques Dallest. Les cinq autres ont été remis en liberté, mais placés sous contrôle judiciaire avec interdiction d’exercer leur profession et de se rendre dans les locaux de la BAC Nord.

Le parquet de Marseille avait requis le placement sous mandat de dépôt de quasiment toutes les personnes mis en cause. Le juge des libertés et de la détention (JLD) a cependant estimé que les faits étaient graves et conformément aux réquisitions du ministère public, opté pour l’incarcération des personnes soupçonnées d’être les plus impliquées, en expliquant que « le trouble à l’ordre public était important et que des risques de réitération des faits n’étaient pas à exclure. »

Manuel Valls intervient directement dans l’affaire

Après l’annonce de toutes les mises en examen dans les médias, Manuel Valls a déclaré vendredi soir que « le directeur général de la police nationale a immédiatement suspendu les policiers mis en cause« . Le ministre de l’Intérieur a ajouté qu’il avait « décidé de dissoudre la BAC de jour de la division de police nord de Marseille ».

« Les faits pour lesquels les policiers ont été mis en examen sont d’une exceptionnelle gravité », a insisté Manuel Valls dans un communiqué. « S’ils sont avérés, ces faits portent atteinte à l’honneur et à la probité dont doivent être porteurs celles et ceux qui assurent la sécurité de nos concitoyens ».

« Le ministre de l’Intérieur a demandé au préfet de police, dès le premier jour, de tout faire pour assurer la sécurité des habitants des quartiers nord de Marseille« , ajoute le communiqué émanant du ministère, précisant qu’une « nouvelle structure sera proposée concernant la réorganisation des BAC sur Marseille » et que « les méthodes et les moyens de sécurisation et de lutte contre la délinquance seront revus ».

« En dépit d’une ampleur que nul ne conteste, cette affaire ne doit pas conduire à jeter le discrédit sur l’ensemble des 7.000 policiers du département des Bouches-du-Rhône », a insisté le ministre qui doit se rendre dès le 12 octobre à Marseille.

La plupart des policiers mis en cause ont refusé d’être assimilés, lors de leurs auditions, à des « des flics ripoux ». « On a voulu faire un exemple. Alors, on met tous les policiers dans la même charrette« , déclarait vendredi soir Me Béatrice Manoukian, l’avocate de l’un des policiers écroués. « On les présente tous comme des ripoux, alors qu’on n’est que sur des présomptions. Cette affaire va faire beaucoup de mal« , a-t-elle ajouté.

Une véritable mafia organisée

Jacques Dallest, Le procureur de la République de Marseille, avait dénoncé vendredi « un système organisé de vol, de racket et de trafic de drogue dans une affaire qui est loin d’être terminée« . « On a une gangrène qui a touché ce service », avait annalysé le magistrat au sujet des policiers incriminés. « On trouve à peu près tout le catalogue des agissements les plus inacceptables« , avait déclaré-t-il lors d’une conférence de presse, évoquant successivement la perquisition systématique de drogue sur des dealers, de cigarettes, d’argent liquide, mais aussi « des pratiques illégales de partage d’argent et de stupéfiants« .

BAC de Marseille : un dealer témoigne par BFMTV

Au cours des diverses investigations menées par les enquêteurs de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) dans les vestiaires et dans les faux plafonds des locaux de la Bac nord, des produits stupéfiants en quantité honorable ont été saisies - notamment de l’herbe et du shit, pour un total de 450 grammes, ainsi que de l’argent liquide (800 euros), une dizaine de bijoux, une sacoche « ayant pu appartenir à un revendeur de drogue », selon la formule du procureur, ainsi que des pochons destinés au conditionnement de cannabis. M. Dallest a également confirmé que les véhicules de ces policiers avaient été mis sur écoute de mai à septembre. Les conversations enregistrées « sont véritablement accablantes », a-t-il commenté. Une cagoule a également été trouvée dans le casier professionnel de l’un d’entre eux, âgé de 27 ans. Après tout, on ne sait jamais, ça peut toujours servir ce genre de chose en cas de braquage…


Bac de Marseille : un ancien policier témoigne par BFMTV

Les suspects, âgés de 25 à 50 ans environ et dont le plus gradé est brigadier-chef, auraient été « peu loquaces » devant les enquêteurs de la police des polices. Leurs conjointes et des proches ont également été entendus. « La plupart expliquent qu’ils ne se souviennent de rien ou expliquent que c’étaient des blagues, des plaisanteries. Mais d’autres reconnaissent qu’il y avait bien un partage de cigarettes, de drogue, prises sur les vendeurs », a indiqué le procureur. Reste à éclaircir, selon lui, l’ampleur exacte du trafic et l’utilisation des sommes ainsi récoltées.

M. Dallest a ajouté que d’autres arrestations pourraient encore intervenir. « On est véritablement dans un système qui implique un nombre très important de fonctionnaires au sein de la BAC jour. L’instruction va se poursuivre et il est envisageable que d’autres soient inquiétés pénalement. C’est une gangrène qui a touché ce service, si je puis le dire ainsi. »

Les policiers de la Bac nord risquent jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle au titre de l’ »extorsion en bande organisée », une qualification criminelle dont le procureur a rappelé vendredi la gravité. Une information judiciaire avait été ouverte par le parquet de Marseille le 22 février 2012. Elle faisait suite à une enquête préliminaire diligentée depuis novembre 2011.

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