Un des deux auteurs de l’attentat de Boston d’avril dernier a sa photo en couverture de la version américaine de Rolling Stone. Un choix qui a provoqué un tollé de critiques et mis à mal le magazine légendaire.
Le magazine américain Rolling Stone a l’habitude de faire poser en couverture de grandes stars de la musique, en particulier du rock. Pour sa une de l’édition du mois d’août, le bimestriel de légende, dans sa version américaine, a décidé de mettre une photographie de Djokhar Tsarnaev, le coauteur présumé de l’attentat de Boston qui a fait 3 morts et plus de 260 blessés. La photo, postée par l’adolescent tchétchène lui même comme photo de profil sur Facebook avant les attentats, lui donne un air de rock star romantique. Bien loin de l’image d’un meurtrier, en ce moment même incarcéré dans une prison hôpital.
Sur les réseaux sociaux, c’est une avalanche de critiques et de commentaires acerbes. Une certaine Adrienne Graham accuse Rolling Stone de «donner une touche de glamour au terrorisme», tandis que Tom Guerra estime que «la photo du petit garçon de 8 ans tué par cette ordure» aurait été bien plus à sa place en une que celle de Djokhar Tsarnaev. Certains annoncent se défaire de leur abonnement au magazine : « Stephen Sherb : Je viens juste d’annuler mon abonnement, que j’ai depuis 1972« , d’autres encore insultent le magazine au nom de Boston (on vous le laisse en anglais) : « Andrew Cassidy : Dear Rolling Stone, F*** you. Sincerely, Boston. » Sur twitter, un hashtag #boycottrollingstone fait fureur et quelques fausses couvertures du magazine avec les victimes de l’attentat apparaissent.
Une couverture ambiguë
Même le maire le Boston, Thomas Menino, a déploré le choix de cette une dans un courrier adressé au magazine: « Votre couverture (datée du) 3 août récompense un terroriste en le traitant comme une personne célèbre. C’est, au mieux, mal pensé, et cela transmet à nouveau le message terrible que la destruction apporte de la notoriété aux tueurs et à leurs ». Il faut dire que cette couverture est très ambiguë. Les présentateurs du «Today Show», la grande émission matinale de la chaîne américaine NBC, notaient mercredi matin que sur ce cliché le jeune homme avait un air de Jim Morrison, le chanteur des Doors, plusieurs fois en tête d’affiche de Rolling Stone. Sous la photo, le grand titre « The Bomber » (Le poseur de bombe) lui donne un surnom de star ou de héros de bande dessinée. Le sous-titre, « comment un étudiant populaire et prometteur a été abandonné par sa famille, est tombé dans l’islam radical et est devenu un monstre », appelle presque à l’empathie.
Face à ce tollé, le journal s’est défendu sur sa page Facebook en déclarant : « Notre cœur est avec les victimes de l’attentat du marathon de Boston, et nos pensées vont toujours vers elles et leurs familles. L’histoire que nous publions cette semaine fait partie des traditions du journalisme et de l’engagement depuis longtemps de Rolling Stone à faire une couverture complète et sérieuse de la plus importante question politique et culturelle de notre époque ». Dans un communiqué, le magazine a en plus expliqué qu’il est « d’autant plus important pour nous de regarder attentivement la complexité de cette affaire et d’aboutir à davantage de compréhension de la manière dont une telle tragédie peut se produire que (l’accusé) Djhokhar Tsarnaev est jeune, et appartient à la même tranche d’âge que beaucoup de nos lecteurs ».
L’article en question, est le fruit de l’enquête de deux mois de sa journaliste Janet Reitman qui a rencontré des dizaines de sources proches de l’accusé pour retracer le parcours de ce jeune terroriste. Selon le magazine, l’enquêtrice livre ainsi «un récit fascinant et déchirant sur la façon dont un charmant enfant avec un brillant avenir est devenu un monstre». Dans un article d’explication publié sur internet, Rolling Stone fait état de cinq grandes révélations que l’on peut trouver dans le reportage. Une manière de justifier un mauvais choix sur la base d’un journalisme (présumé) sérieux.
Dans l’hexagone, la version française du magazine se veut plus simple et moins alarmiste. En couverture, on vous le donne en mille, ces bons vieux du groupe tout aussi mythique que le magazine, les Rolling Stones.