UMP: Copé contre Fillon ou la cour des coqs

Raffael Enault 16/10/2012 0

L’après Sarkozy à ceci de difficile que son départ a laissé place à un chaos sans précédent à l’UMP- le parti qui devait réunir les droites.

Divisé entre deux ex sous lieutenants de l’ancien président, le principal parti d’opposition doit désormais se trouver une identité nouvelle sans renier son héritage gaulliste et surtout sarkozyste qui plaît encore tant à une moitié de français étrangement nostalgiques.

Il y a encore quelques années, le RPR –l’ancêtre de l’UMP- avait l’avantage de présenter des figures connues du grand public. Ces ténors de droite étaient, pour la plupart, connus et crédibles auprès du peuple. Alain Juppé, l’éminence grise de la droite républicaine n’a jamais –à cause d’affaires embarrassantes – pu occuper les premiers rôles. Après lui, c’est le néant. Les anciens sont désormais à la retraite et les nouveaux sont encore trop jeunes pour pouvoir prétendre à quoi que ce soit.

Et puis, l’UMP est également victime de sa formule fondatrice. Le fourre tout des débuts a laissé la place a une gigantesque cacophonie collective. Personne ne s’accorde, au point d’avoir réussi à dénaturer complètement le principal parti de droite de ses valeurs fondatrices. Sans repères moraux clairement établis, l’UMP a perdu toute sa substance qui était à la base de représenter l’idéologie de la droite républicaine.

Une succession délicate

L’euphorie à droite pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy à laisser place le soir du 6 mai à une épouvantable gueule de bois. Un parti sans chef, en politique, ça n’existe pas. Or, le charisme fédérateur de l’ex pensionnaire de l’Élysée n’a pas permis aux autres membres de sa famille politique de se développer.

À trop avoir entendu Rachida Dati, Roselyne Bachelot, David Douillet ou encore Nadine Morano, les français se sont éloignés d’une droite qui ne leur correspondait plus. Après une épuration massive et naturelle opérée pendant les législatives, l’UMP croyait s’être débarrassé de ses brebis galeuses. Seulement, des fois, « un seul être vous manque est tout est dépeuplé. » Sans le petit Nicolas, les autres –ce qui n’ont pas eu le talent de conquérir eux-même- se trouve propulsés sur le devant de la scène. La responsabilité est d’autant plus grosse que déjà se profile à l’horizon l’échéance de 2017.

Logiquement, celui qui héritera du poste de chef du parti s’assurera une place en finale lors de la prochaine élection présidentielle. C’est dire si le choix est important.

Faute d’espoir, les militants UMP –pour beaucoup des ex aficionados de Sarkozy- doivent désormais choisir entre la peste et le choléra. Aucun des deux n’emballe vraiment personne, mais faute de mieux, les militants s’en contente. Après tout, si François Hollande – un homme normal- a réussi à devenir président, pourquoi pas un autre…

Du sous Sarkozy contre du sous Chirac

Là, il n’est pas question de sous –d’argent- mais bien de versions moins talentueuses d’anciens leaders politique. François Fillon a ceci de précieux qu’il ne froisse personne. Son calme rassure les classes moyennes quand, au contraire, les aboiements de son rival Jean-François Copé n’excitent uniquement que les plus perdus des militants UMPistes.

Car n’est pas Jean-Marie Le Pen ou Nicolas Sarkozy qui veut. Pour rappel, l’ex président est la personnalité politique qui a affronté le plus souvent le président d’honneur du Front National lors de débats médiatisés. Copé lui, n’a ni le courage d’affronter l’extrême droite, ni le talent de réunir la droite. « Même si une chèvre nait dans une écurie, on en fera jamais un cheval de course » déclarait d’ailleurs Jean-Marie Le Pen. Avec M. Copé, c’est un peu la même chose. À avoir côtoyé de trop près Nicolas Sarkozy, il n’en a retenu que le pire. La polémique des enfants blancs rackettés par de vilains musulmans pendant le ramadan n’a rien de très factuel. Pire, elle caricature ce que la droite et même l’extrême droite essaye de faire comprendre avec diplomatie et tact au peuple depuis longtemps au sujet des différences culturelles. En se lançant sur les terres de l’extrême droite, Copé a renié sa famille politique sans pour autant devenir crédible auprès de l’électorat lepéniste. Le résultat est assez simple : il est décrédibilisé.

Pour se défendre des attaques de journalistes au sujet de ses liens idéologiques avec le FN, Nicolas Sarkozy avait pour habitude de répondre « ce n’est pas parce que M. Le Pen dit que le soleil est jaune que je devrais dire qu’il est vert. » Sous-entendu- J.M. Le Pen ne dit pas que des bêtises. Mais Jean François Copé n’a pas l’art de la formule… N’est pas président qui veut.

Mais comment la droite en est-elle arrivée là ?

Mai 1968 a été un choc est une transformation sans précédent pour le monde politique français. La libération des mœurs a aussi été synonyme de libération totale des marchés financiers. Sans frontières réellement établies, sans valeurs morales indispensables, sans même aucune limite dans le monde de la spéculation financière, la France a perdu ses repères et son âme politique avec. À droite, le résultat a été relativement simple à analyser. Le départ du Général De Gaulle a coïncidé avec l’arrivée de George Pompidou. Du guerriers gaulois libérateur, on est passé au banquier apatride.

À partir de là, tout a été changé. Le capitalisme « à la papa » -c’est à dire un capitalisme national et régional de notables - a été remplacé par le capitalisme international – de spéculation. Les frontières transatlantiques se sont ouvertes, l’Europe est devenu un Etat économique à part entière et l’émergence de nouveaux pays – tels que la Chine ou L’inde- sur la scène mondiale ont relayés au second plan les principes fondamentaux d’un pays qui fonctionne. Le travail manuel a été anéanti par le mirage de la culture de masse pour tous, au point que le prolétariat productif d’hier s’est aujourd’hui métamorphosé en un prolétariat de bureau qui n’apporte rien à la société.

Tuer les derniers cols bleus français correspond également à l’appauvrissement systématique du pays. Or, un pays qui ne produit pas, c’est un pays pauvre et ce, surtout avec la concurrence actuelle des marchés émergents. Si la France n’est plus capable de produire, qu’est-ce qui peut la sauver ?

Mourir en douceur

L’État a voulu faire croire que les français pourraient, un jour, s’affranchir des règles du capitalisme de base, le capitalisme productif.

Le résultat a été directement perceptible. De nouveaux métiers –comme ceux du monde de la pub ou du commerce du vent- ont émergé et tout est devenu une question d’image uniquement. Tout s’est dématérialisé, tout est devenu spéculation. Sans valeurs réelles, sans bases sécurisantes, là France s’est perdue et ses élites avec. De l’après Pompidou est finalement né l’ensemble des figures actuelles de l’UMPS.

Comme le disait Marx, « ce que vous comprenez pour la propriété féodale, vous ne le comprenez plus pour la propriété bourgeoise. » La société actuelle est similaire : elle n’est plus capable de différencier les grands financiers des petits patrons, les familles de notables des groupes de banquiers… Sans valeurs solides, le peuple français n’est plus maître de ses décisions.

En attendant, le retour à certaines valeurs, la France devra donc se contenter de choisir parmi des clones… Rien de plus. Alors l’un ou l’autre, rouge ou bleu, qu’importe…

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